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Exposition El Greco.

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Visite de l'exposition Le Greco. Hors le fait qu'il y avait trop de monde, j'ai apprécié le travail de l'artiste. Voici quelques réflexions.

El Greco

Le statut de l’artiste

Le peintre d’icônes était considéré comme un artisan (statut de labeur) et non comme un représentant des arts libéraux (génie créateur). Les peintres vénitiens avaient obtenus le statut d’artistes libéraux depuis peu.

À Tolède, El Greco est confronté au statut d’artisan. Demandant un tarif important pour le paiement, il a souvent dû porter le différent devant la justice. Le commanditaire précisait lors du contrat ses souhaits (type de tableau, couleur, format,…). Le premier paiement correspondait à l’achat des produits pigments, support, enduit, médium… ; le second intervenait en cours de réalisation. Il y avait un suivi du tableau afin de vérifier s’il correspondait à la commande. Puis à l’aboutissement du tableau, le commanditaire et l’artiste nommait chacun à un évaluateur. S’il y avait une divergence entre les deux évaluations, un arbitre était nommé, mais parfois l’affaire était portée devant la justice. Le paiement dans ce cas était reporté, les procédures pouvant s’éterniser au point que l’artiste ne soit pas payé.

Les divergences reposaient sur le coût du tableau, le temps passé, le savoir-faire,  le travail iconographique et catéchétique. El Gréco pouvait avoir un succès artistique mais suite aux procédures, il avait du mal à trouver des commandes auprès des institutions religieuses importantes.

El Greco a choisi l’art religieux et le portrait comme sujets principaux. Le choix des thèmes est limité, il dépend des commanditaires et donc de la mode de l’époque.

 L’art religieux lui permettait d’exprimer sa pensée théologique, et sa vision de la peinture. El Greco avait une haute opinion de la valeur de son art par lequel il voulait  exprimer sa vision théologique. La peinture de portraits lui donnait la possibilité de souligner sa faculté à montrer le caractère de ses personnages, ainsi que la position sociale des personnes peints par son sens du détail (livres, vêtements, éléments symboliques…) et par la composition.

Saint Luc peignant la vierge offre au Greco un prétexte idéal pour discourir sur le rôle du peintre comme créateur d’image aidé par le Divin. La sainte Véronique avec le Saint Suaire, vraie icône, légitime encore davantage la fabrique des images dans la mesure où c’est le Christ lui-même qui l’avait produite. Cette icône nous montre le génie d’El Greco.

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Importance de la vision religieuse, importance du concile de Trente, lutte entre Réforme/Contre-Réforme.

Concile de trente décembre 1945 - décembre 1563

Les protestants refusent les représentations des saints, ….

Pour les orthodoxes, les icônes sont destinés à la prière.

« L’icône est un langage, qui tente, au moyen de signes, d’exprimer la même vérité que la Parole sacrée. » Daniel Rousseau auteur de  L’icône, splendeur de ton visage .

Les catholiques après le concile de Trente vont réglementer l’iconographie des peintures. La peinture est là pour professer les concepts de la religion, c’est un catéchisme. Elle est  également là pour favoriser la prière objet de culte pour une clientèle riche. Cette peinture prend la forme de petits tableaux de dévotion dont la réalisation est supervisée par l’Inquisition. Pour les orthodoxes, l’icône elle-même est prière, tant pour celui qui peint que pour celui qui est devant l’icône. La peinture d’icône est un chemin d’accès à la transcendance.

Lors de la Renaissance, après la redécouverte de l’art antique et de ses codes, la représentation humaine devient plus naturaliste et descriptive. El Greco va utiliser des critères de peinture de la Renaissance en particulier en utilisant dans son iconographie les sculptures de Michel-Ange, les peintures du Titien, du Tintoret, de Bassano, … et les gravures qui circulent d’un pays à l’autre donnent connaissance des  réalisations des artistes d’autres régions.

Dans le contexte de la Contre-Réforme, on revient sur l’importance de l’image en insistant sur le fait que si elles sont censées susciter la dévotion, elles ne doivent en aucun cas risquer d’être confondues avec ce qu’elles représentent afin que l’icône ne devienne une idole. La peinture se fait catéchétique, enseignement des dogmes de l’église, plus que chemin vers Dieu.

Dans le statut de l’artiste, la peinture de portrait est d’un statut inférieur à la peinture d’histoire à Rome ;  si l’acquisition de peintures est faite par la hiérarchie de l’Église ou par la Cour cela permettra d’obtenir de prix élevés. Quand Le Greco peint des portraits ce n’est donc pas comme nous pourrions l’imaginer une peinture reconnue de grande valeur.

 

Passage de la peinture d’Icône à la peinture de la Renaissance italienne.

L’icône est une peinture religieuse du monde orthodoxe avec des contraintes nombreuses, liées à la question de l’autorisation de l’image, de la symbolique. Le cadre spatial est plus divin qu’humain. Les peintres d'icône avaient pour but d'incarner le monde de l'esprit dans leur art, et cette approche sera celle du Greco dans toute sa carrière. Dans but, les peintres d’icône vont utiliser entre autres des moyens techniques : fond d’or, matière inaltérable qui dit la lumière divine, passage de l’ombre à la lumière en commençant par les couleurs foncées pour les éclaircir petit à petit, jusqu’à la lumière blanche, perspective souvent inversée, symbolique de la couleur, des attributs, de la composition.

Une très belle collection d’icônes, dont les Créto-Vénitienne sont à voir dans la collection permanente du Petit Palais. Il y a également des icônes au Louvre.

El Greco avait une connaissance de la peinture vénitienne de son temps par le truchement des reproductions, en particulier des gravures. On peut le voir dans l’icône « St Luc peignant la Vierge ». La position de l’ange au-dessus de St Luc est un mouvement de l’art italien du XVe siècle. L’introduction de la présence de St Luc peignant est une représentation de l’homme plus que de l’évangéliste.

L’icône est une peinture à l’œuf sur panneau de bois. En Italie, les peintres peignent à l’huile sur toile ou réalisent des fresques. Arrivé à Venise, El Greco apprend la technique de l’huile, par contre il n’apprend pas la fresque, ce qui lui supprima des possibilités de contrats. Il découvre également la pensée autour de la représentation de l’homme. La Renaissance a quitté la représentation d’une Vierge  hiératique,  dans un espace dont on ne sait pas bien où est la terre, où est le ciel…

Il y a le passage de la peinture à l’œuf, à la peinture à l’huile. À l’œuf la peinture est plus couvrante que les glacis de peinture à l’huile. L’artiste commence par préparer son support en blanc, on met en place le dessin, puis la couleur.  On part de l’ombre pour aller vers la lumière, les valeurs sont données par couches successives. Les couleurs sont posées en aplat le plus net possible. La lumière vient de l’intérieur de l’œuvre et non de l’extérieur.

À l’huile l’artiste peut travailler les dégradés, les fondus, avec plus de finesse et grâce au temps de séchage plus long, il peut travailler directement sur la toile. Le Greco pourra développer une touche rapide, en glacis ou riche en matière et ainsi créer des modelés plus subtils.

Les pigments sont les même quelques soit la technique, par contre leur utilisation n’est pas tout à fait la même, par exemple l’utilisation de l’or (symbole du divin dans les icônes), que l’on n’utilise pas à l’huile, peut-être pour des raisons techniques. Les mélanges ne sont pas les mêmes. Les questions chimiques sont importantes, certaines couleurs ne peuvent être mélangées entre elles, d’autres créeront des réactions chimiques avec les liants, mais cela est au-delà de mes compétences.

Parallèlement à l’utilisation de l’huile, il y a aussi l’évolution du support avec les châssis et la toile. La peinture à l’œuf est souvent délicate avec de petits pinceaux, on peut voir qu’El Greco travaille avec de gros pinceaux lui permettant de travailler avec de geste large. Il y a aussi la préparation du fond en rouge comme sous couche pour l’huile.

Utilisation de reproductions de toiles de maîtres en gravure, utilisation des sculptures  comme modèle de composition, de positionnement des personnages, de leur mouvement. Utilisation des livres qui permettaient de voir certaines reproductions. Le Greco avait une collection de petites sculptures en terre et en cire, certaines réalisées par lui-même. Cette pratique était courante, le Tintoret le faisait à Venise.

Dessin

En grec dessin signifie plan projet.

Le Greco compare l’apprentissage du dessin à celui de la grammaire ou plus généralement de la langue, soulignant l’effort et l’application constante que requiert sa maîtrise. Le dessin permet de mettre au point et d’affiner ses propres instruments d’expression. Le dessin revît un rôle fonctionnel et non conceptuel. Le processus créatif est dans la peinture. En peinture le Greco procède sans repentirs, dessins, sans cartons. La peinture est son propre modèle (ce qui expliquerait les nombreux petits formats, ricordos, servant de catalogue présents dans son atelier), et se réinvente au fil des reformulations. 

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La pratique de composer ses toiles directement sur la toile au pinceau l’avait acquise à priori à Venise, comme le faisait déjà Giovanni, Bellini le Tintoret. Cette technique amenuise le caractère linéaire et abstrait de la peinture si chère à l’école florentine. Cela correspond à la « guerre » entre Vénitiens contre Florentins et Romains. Comme on peut le voir par la suite en France entre les partisans du dessin Ingres et les partisans de la couleur Delacroix.

Dans l'adoration des mages de 1579 nous pouvons voir la capacité du Greco à manier l'huile. Dans la partie haute, on peut voir les glacis successifs,  la finesse des glacis comme la matière du blanc, le geste du pinceau,

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« Pensée de l’artiste » …

On ne peut séparer le génie d’un artiste du contexte dans lequel il exerce son art. Il y a la pensée des symboles, il y a les compositions que le peintre a connues car elles existaient au préalable. Les conventions de chaque époque. Il cherchera toute sa vie à combiner sa conception religieuse, sa vision de l’humain et sa haute opinion de l’art pictural, avec le principe de réalité « il faut gagner sa vie ».

Il choisit de traduire une peinture religieuse proposant une expérience mystique, dans un espace indéterminé. Sa peinture se veut messianique, cherchant à traduire l’invisible, l’indicible. La peinture italienne est plus catéchétique et vraisemblable.

Lorsqu’il peint les portraits il sera reproché au Greco de ne pas être assez ressemblant dans l’apparence du sujet. Il donne plus d’importance au rendu du caractère, à la force de la peinture qu’à l’idée que les personnes veulent rendre d’eux-mêmes. Sa touche enlevée, vigoureuse amène une disparition du détail.

La Renaissance avec la redécouverte de l’art antique, de la pensée grecque, va retrouver la « Mimesis », ou imitation de la nature. Le Greco choisi de traduire une vision intérieure personnelle du monde, influencé par sa connaissance du monde de l’icône orthodoxe.

 Suite à une réflexion souvent entendue, j'ai regardé les mains peintes par Le Greco. Sur certaines nous retrouvons les mains telles quelles sont peintes dans les icônes. Nous pouvons également être étonnés de la forme de certaines mains, elles paraissent raides, mal construites, la question du réalisme n'est pas la même suivant les époques. Dans certaines compositions nous voyons comment la position des mains disent la relation entre les personnages.

Saint Pierre - Saint Paul

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La sainte Famille

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Marie-Madeleine

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Je suis impressionnée par le travail qu’El Greco a du faire pour passer de l’icône objet de culte orthodoxe à la peinture italienne, plus proche de de l’humain que du divin.

 

Quelques dates

1541 Naissance à Candide en Crète

1546-1547   fréquentations des ateliers d’icônes

1556   premiers dessins

1565-1567- Maître d’icône, réalisation de l’icône St Luc peignant la vierge.  Dormition de la Vierge Mort du père de l’artiste.

1567   Départ pour Venise

1568-1569  Triptyque de Modène (recto-verso)

1570   Installation à Rome, portrait de Giulio Clovio

1577   Départ pour l’Espagne, installation à Tolède

1578   Séjour à Madrid, naissance de son fils Jorge Manuel

1582   Interprète lors d’un procès de l’Inquisition

1602   Débuts des relations avec le conseil du gouvernement de l’archevêché de Tolède

1614   Mort à Tolède

 

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